Grand Ours

Grand Ours

Grand Ours

Casterman / 2005

Auteur·rice : François Place
Illustrateur·rice : François Place

Résumé
Avec Françoise Place, on s'attend à plonger dans les Abymes et les murmures du monde vivant. On sait que la délicatesse trouvera une place pour tenir tête à la violence. Cela s'appelle faire confiance à un auteur-illustrateur, certes, mais aussi, espérer des troubles. Le considérer comme une valeur sûre qui peut surprendre. De quoi se mettre en appétit. Surtout, après un long silence littéraire, les retrouvailles sont fébriles. C'est presque un atout d'avoir échappé à l'avalanche des parutions, et c'est avec sérénité que nous ouvrons ce grand album, plongeant dans l'aurore de l'humanité, dans le monde des animaux sauvages, des bisons, des chevaux, dans les grands espaces. Préambule, pré-histoire. Un temps où le peuple fragile des marche-debout est en prise perpétuelle avec la survie.
L'enfant Kaor nous embarque dans la vie de son clan, on le suit, on l'observe dans ses découvertes et sa singularité. C'est que Kaor est sous la protection de Grand Ours, à son insu. Grand Ours sait, il peut raconter l'apprentissage de la chasse, de la pêche, des règles de la vie collective au campement ... C'est aussi Grand Ours, protecteur, qui peut connaître et évoquer la force de la sensibilité et des relations inter-personnelles en ce temps-là. Qui peut parler de la force des liens entre une enfant et un animal ? Qui peut dévoiler ce qui pousse les hommes à peindre les scènes de leur vie sur les parois des grottes ? Qui peut parler de sensibilité, de sentiments, au temps où le langage est celui des cris, des gestes, des traces ? Quelqu'un qui a rencontré Grand Ours ... et qui possède le langage des histoires.
A cette époque, le monde était plein de "sauvagesse" (terme aujourd'hui disparu, qui évoquait une sauvagerie mêlée de sagesse). Sans doute aussi pouvait-on parler de "confinitude", cette solitude des confins, qui fait une place à la sensibilité de la nature : conscience de l'esprit animal, de l'esprit de la terre, de l'esprit du cosmos. La puissance des liens homme-anipal-nature sauvage abondeen cruautés et dangers de toutes sortes dans nos représentations. Le parti pris de ce livre est peut-être d'y insuffler de l'humanité, de l'individualité. Le sens du sacré est indissociable de la vie quotidienne et le présent s'apparente à une mythologie. Les aquarelles inondent le livre comme unpaysage infini, et le trait qui donne forme aux choses et aux êtres,tremble d'inquiétude.

Valérie Négrel
Chronique parue dans Lulu, 2006, Bibliothèque municipale de Cherbourg
2007
Aventure
Album